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Entretien avec Mioara Tudose, auteure de « Fleur, une histoire roumaine »

Dernière mise à jour : 29 janv.

Fleur, une histoire de famille, une histoire de transmission


Mercredi, 10 heures. Il semblerait que la même grisaille couvre le ciel de Mioara, à Amboise, et le mien, à Besançon. Heureusement, la voix chantante, encore bien imprégnée d’accent roumain, de l’auteure de Fleur illumine ma matinée. Avec toute l’humilité qui la qualifie, elle a accepté de mes faire part des raisons qui l’ont poussée à écrire cette histoire, l’histoire de sa mère. Comme un hommage, une reconnaissance, et surtout, avec le puissant désir de transmettre, sans manières et dans la plus grande sincérité.


Photo sépia d'une famille de cinq personnes, les deux parents derrière, les trois enfants devant.
Photo de famille, Fleur est au milieu

Pour commencer, comment doit-on vous appeler ? Mioara Tudose ou Mioara Gaubert ? 

Tout simplement, Gaubert. C’est mon nom de famille, mon nom d’épouse. Tudose, c’est mon nom de jeune fille. Pour le livre, j’ai laissé Tudose. C’est un petit quelque chose qui m’appartient…


Étiez-vous prédestinée à l’écriture ? Comment en êtes-vous venue à écrire ce livre ?

Mes tout premiers écrits sont venus assez jeune, vers 12 ou 13 ans. Je faisais de courts poèmes que j’avais même présentés, une fois, en classe. La professeure de français était enchantée. Mais à l’adolescence, c’était fini.

C’est revenu beaucoup plus tard, après la quarantaine. J’ai recommencé à écrire, mais ça ne donnait rien, je n’aimais pas : tout est parti à la poubelle.

Et un jour, c’est venu comme ça, je me suis dit : « Ce serait bien que je raconte à mes petits-enfants l’histoire de ma mère. » Parce qu’elle me tenait à cœur. C’était une personne très intéressante. Elle avait de grandes qualités, de femme, d’épouse et de mère.


Donc ce qui vous a inspirée, c’est le fait que ce soit une histoire très personnelle, finalement ?

Oui. Ma mère est restée en Roumanie. Le peu de temps qu’on passait ensemble, — tous les dix-huit mois, deux ans — on se racontait de petites choses, elle me donnait des souvenirs d’elle. Je voulais garder en mémoire tout ce qu’elle me racontait. Je me suis dit que j’allais rassembler tout ça pour en faire quelque chose. Ça a commencé avec l’histoire de la petite fille, Ana. C’est ma sœur ; mais ce n’est pas tout à fait ma sœur. Je vous laisse découvrir…

Elle mérite qu’on lui garde tout ça, tout ce qu’elle a supporté pendant sa jeunesse, son enfance, qui a été très difficile. Et puis, le combat d’être mère, pour sauver sa fille. Je me suis dit : « Il faut que je l’écrive ! » J’ai commencé… Et voilà !



Une fois que vous étiez lancée, la suite a découlé naturellement.

Oui, aussi parce que je me suis dit qu’il fallait aller jusqu’au bout.

Et il s’agit d’une partie de sa vie. Il y a d’autres éléments importants que je n’ai pas détaillés. C’est juste un passage de sa vie, avec la petite Ana.

Mais il y a quand même ses souvenirs d’enfance.


Les souvenirs de votre mère ?

Oui. Elle se souvient de son enfance.


Vous avez rédigé à la première personne ?

Oui. Pas le début. Mais ses souvenirs sont à la première personne.

Je ne savais pas comment commencer. Un ami auteur m’a conseillé d’écrire à la première personne, me disant que ce serait beaucoup plus facile.


Justement, comment écrit-on sur du réel ? Comment retranscrit-on ? Quels outils, quelles méthodes avez-vous utilisés ?

Tout au long de cette histoire, j’ai raconté des événements qui se sont réellement déroulés dans la vie de maman, mais j’ai aussi ajouté des passages que j’ai imaginés, comme des clins d’œil. Il a quand même fallu que je fasse très attention à l’Histoire, que je consulte des livres…


Vous avez dû faire un travail de recherche ?

Eh oui, il ne faut pas raconter de bêtises ! Dans les années 1940, il y avait encore un roi en Roumanie (le roi Michel 1er). Après la guerre, on a basculé dans le régime communiste. J’ai fait beaucoup de recherches. Heureusement qu’il y a Internet (elle rit). Et les livres, bien sûr !

J’ai aussi pioché à droite et à gauche dans les souvenirs de mon entourage, et j’ai fait mon mélange. Ça a donné un livre assez romancé. Autour de moi, les gens disent qu’ils ont dévoré Fleur, tellement il leur a plu. Pourtant, je l’ai composé avec mes mots à moi, c’est simple.


Photo en noir et blanc d'une famille qui pose derrière et sur un lit d'hôpital.
Avec la petite Ana, à l'hôpital

Vous avez pris du plaisir à l’écrire ?

Ah oui, je me suis régalée, notamment sur certains sujets. La plupart des anecdotes sont tout de même de véritables histoires, que j’ai développées à ma manière.


Envisagez-vous la rédaction d’un second ouvrage ?

Ça fait quatre ans que j’ai commencé l’écriture du deuxième, mais je n’en suis qu’à la moitié. C’est l’histoire, totalement imaginée, d’Hélène. Ça commence dans les années 1900-1910, et ça se passe en Afrique du Sud. Pour l’instant, il n’est pas question de l’éditer.

J’aime l’écriture depuis toujours, je suis assez rêveuse, mais je ne suis pas écrivaine ; j’écris de temps en temps, je ne me concentre toutefois pas longtemps. Mon travail, depuis des années, c’est la peinture et la mosaïque (consulter la galerie de Mioara Gaubert).


Qu’est-ce qui vous a plu chez Bougainvillier éditions ? Comment en êtes-vous venue à envoyer votre manuscrit à cette maison ?

Cela s’est fait par hasard. Jean, un ami qui fait partie d’un comité de lecture, a parlé à Stéphane Aucante de Fleur. Stéphane a voulu voir de quoi il s’agissait. On a pris contact. Pendant au moins six mois, nous avons retravaillé le texte ensemble, pour corriger, changer des choses, des chapitres.

À la fin, on s’est rencontrés au Salon du Livre des Balkans, à Paris, les 8 et 9 décembre 2023.

Stéphane est un éditeur dévoué. C’est un plaisir de parler et d’échanger avec lui.


C’est bien d’avoir ce bon rapport auteur-éditeur, surtout quand il est question de remanier ses écrits.

Oui, d’autant plus qu’on était contraints par le temps. Il fallait à tout prix que le livre sorte pour le salon. Et effectivement, il est sorti deux jours avant !

On a survécu à tout ça (elle rit) !


Photo de Stéphane Aucante et Mioara Gaubert derrière un stand avec des livres, au Salon du Livre des Balkans.
Mioara Gaubert et Stéphane Aucante au Salon du Livre des Balkans – © Photo de Cédric Cohen - Studio Paranoïd

Pour finir, vous ne regrettez pas d’avoir mis autant d’énergie pour obtenir ce résultat ? Pas du tout, je me suis bien amusée. Au début, j’étais quand même un peu stressée. Je n’avais jamais fait de salon dans le milieu littéraire, seulement des expos, des galeries, pour mes tableaux. Je me suis dit : « Que vais-je raconter ? Qui vais-je trouver ? » Et finalement, c’est venu naturellement. Il n’y a pas eu beaucoup de monde — week-end pluvieux et froid — mais j’ai réussi à vendre huit exemplaires ! Le week-end d’après, en revanche, au marché de Noël organisé par l’association franco-roumaine à laquelle j’appartiens, à Amboise, j’ai vendu une vingtaine de livres ! Nous étions contents, même si mon but, à moi, n’est pas de vendre ; j’ai fait ça pour moi, pour mes petits-enfants. Ma grande petite-fille, qui a 18 ans, m’a dit : « Mamie, j’ai presque fini ton bouquin, il est super, j’adore ! » Quel plaisir d’entendre ça ! J’espère aussi de tout mon cœur que ça marchera pour Bougainvillier éditions, ils le méritent !


Si cet entretien vous a donné envie de lire Fleur, une histoire roumaine de Mioara Tudose, sachez qu'il est évidemment toujours disponible, au prix de 17 €, sur notre boutique en ligne.

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